Comptines
Par Maritxu
Quiconque a été un jour un enfant a entendu « un grand cerf dans sa maison ».
Quiconque a un jour côtoyé un enfant de moins de 3 ans a mimé « un grand cerf dans sa maison ».
Quiconque a un jour essayé de chanter cette comptine en duo avec un autre adulte s’est aperçu qu’on n’a pas exactement les mêmes paroles !
En effet, deux versions de cette magnifique, inépuisable et transgénérationelle chanson existent :
Celle-ci
Dans sa maison, un grand cerf
Regardait par la fenêtre
Un lapin venir à lui
Et frapper à l'huis :
"Cerf, cerf, ouvre-moi
Ou le chasseur me tuera !"
"Lapin, lapin, entre et viens
Me serrer la main !"
Et celle-là
Un grand cerf, dans sa maison,
Regardait par la fenêtre,
Un lapin venir à lui,
Et crier ainsi:
"Cerf, cerf, ouvre-moi,
Ou le chasseur me tuera !"
"Lapin, lapin, entre donc,
Me serrer la main."
D’un point de vue strictement personnel, j’avoue me servir de la version 2 avec une touche de version 1, encore qu’à mon avis, Arthur se fiche éperdument de ce que je raconte, étant vachement plus intéressé par les gestes.
Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu’un deuxième couplet existait également !! Je le livre à vos yeux fébriles et ébahis (vous avez noté comme une biographie de Gotlib reçue à Noel peut avoir des conséquences sur les adjectifs qu’on emploie au quotidien ?) :
Le petit lapin entra
Et le chasseur s'en alla.
Le grand cerf fit à manger :
Carottes et navets.
"Cerf, cerf, grand merci !
Tu es mon meilleur ami"
Et le lapin réjoui
Reparti chez lui !
Edifiant. Je suis bien contente d'être venue.
D’ailleurs, en parlant de comptines pour enfants, je suis persuadée que « à la claire fontaine » n’est pas la douce et belle chanson qu’on voudrait nous faire croire. Petit rappel du texte :
A la claire fontaine, m'en allant promener,
J'ai trouvé l'eau si belle que je m'y suis baignée.
Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.
Sous les feuilles d'un chêne je me suis fait sécher,
Sur la plus haute branche, un rossignol chantait…
Chante, rossignol, chante, toi qui as le cœur gai,
Tu as le cœur à rire, moi je l'ai à pleurer. »…
« C'est pour mon ami Pierre qui ne veut plus m'aimer,
Pour un bouton de rose que je lui refusai. »…
« Je voudrais que la rose fût encore au rosier
Et que mon ami Pierre fût encore à m'aimer. »
Sans rire, vous pensez que son copain Pierre lui refuse son amitié pour une bête fleur ? Ne pourrait-on pas penser que le fameux « bouton de rose » est une jolie expression pour parler du sexe féminin ? Ce ne serait a priori pas la première fois qu’on le comparerait à une fleur…
Donc, à la lumière de ce nouvel éclairage, on comprend mieux pourquoi Pierre fait la gueule : sa copine n’a non seulement pas voulu lui offrir son pucelage, mais en plus elle l’a donné à quelqu’un d’autre !
Alors, les comptines de nos enfants seraient-elles des poèmes libertins d’un autre siècle ?