Un peu de vocabulaire ?
Par Maritxu
Je lis en ce moment sur pas mal de sites des gens qui se plaignent que le vocabulaire est de plus en plus limité, que les gens connaissent sur le bout des doigts les membres de la StarAc et ne connaissent pas Tolstoï, etc…
Tout ce ci est un peu vrai, mais il y a un juste milieu : je n’ai JAMAIS regardé la StarAC, mais je n’ai JAMAIS non plus ouvert un livre de Tolstoï. Mais je sais que les deux existent.
Pour le coup du vocabulaire, c’est vrai que c’est un peu dommage, on a une langue tellement riche, avec tellement de mots pour tout exprimer. Moi j’adore me prendre la tête sur un mot, savoir lequel est le plus juste.
Pas plus tard qu’il y a deux jours, avec mon Belge, on s’est disputés sur l’emploi de « regret » par rapport à « remords », à propos d’une phrase que je venais de lire : « il vaut mieux avoir des remords que des regrets ». Et je suis d’accord avec cette phrase. C’est l’occasion d’ouvrir un peu son dictionnaire ! (pour l’anecdote, c’est moi qui ai gagné (pour une fois)).
Et ça m’a rappelé une autre péripétie de ma vie palpitante, il y a bien longtemps…
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Campons le décor : je suis au lycée, en première, dans le train. Comme tout élève qui prépare le bac français, j’ai une liste impressionnante de bouquins à avaler et je profite de mes trajets en train pour le faire. En ce moment, je suis sur l’Education sentimentale de Flaubert.
En face de moi il y a une fille, un plus âgée que moi, qui regarde le paysage. Par curiosité, elle essaye de regarder le titre de mon bouquin (qui ne l’a jamais fait ?). Comme je ne suis pas peu fière de lire un classique, j’incline mon livre pour qu’elle puisse voir.
A la station suivante, deux racailles montent.(la suite est à lire avec l’accent de la banlieue de Trappes-la Verrière pour ceux qui connaissent)
- Allez z’y va on va embêter les d’moizelles !
Et zutre, c’est pour nous. Les deux boulets se collent à nous et le type qui m’a choisi regarde mon bouquin :
- Oh la d’moizelle elle est cultivée ! Elle lit ! Et elle lit quoi ? Ho l’aut’ ! L’éducation nationale !
La fille et moi on se regarde et on éclate de rire. On arrive plus à s’arrêter. Les deux andouilles sont super surpris :
- Ouais z’y va elles se foutent de not’ gueule, z’y va, on s’tire.
On a ri comme des bossues pendant encore dix bonnes minutes, et puis on s’est souri. Et elle est partie à l’arrêt suivant, sans un mot.
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J’ai adoré cette complicité littéraire muette, même des années après.